Je suis de la race des Don Quijote, l’inutile est ma vertu, le dérisoire est ma parure et mes combats relèvent du burlesque. Je suis l’eau calme et paisible d’une retenue de troncs et de rochers qui attend sa débacle. Enfant déjà je ne voyais dans un soleil fatigué tombant sur l’horizon que l’agonie d’un jour que j’aurais voulu prolonger jusqu’au plus profond de mes nuits si vides qu’elles résonnaient du creux de mes absences.
Jadis, j’ai pu croire qu’il aurait pu n’y avoir de salut que dans une fuite illusoire et facile. Miroir en trompe l’oeil, je n’ai trouvé au fin fond des pampas que l’image ternie et délavée de mes anciennes déroutes pour mieux les reproduire, ainsi en allait-il de ces rêves récurrents qui venaient hanter les nuits de mon enfance. Il me reste aujourd’hui l’éclat doux d’un regard, la marque profonde dans ma chair de la légèreté de ces caresses alors que, dehors, ne cessait de pleurer l’automne des Ardennes.
Je n’attends de la vie que le geste sans cesse renouvelé de l’amour dans une explosion de plaisir partagé avec celle qui aura eu le courage, ou la folie, de me suivre sur le chemin étroit et sinueux d’une vie en partage. Il me suffirait donc espérer et attendre la venue d’une aube qui, même à l’issue de la plus froide des nuits, finit toujours par se lever et balayer d’un éclat de lumière la somme des peurs et doutes amoncelés.
Déjà, je la vois poindre…